Viennent de paraître, les chroniques affichées dans Yevrobatsi.org depuis quatre ans. Aux éditions A d’Arménie.
Rédacteur en chef de Yevrobatsi.org, site créé, en 2004, dans le but de rappeler le génocide arménien au bon souvenir d’une Turquie négationniste désireuse d’entrée dans l’Union européenne, Denis Donikian va rédiger plusieurs dizaines de chroniques dans ce sens, sans pour autant négliger de porter la critique dans son propre camp, à savoir la diaspora arménienne et l’Arménie même, pour fustiger les dérives de l’intolérance et les arrogances du fanatisme. Il n’aura de cesse de tirer les leçons du génocide pour promouvoir un « vivre ensemble » cher à Hrant Dink, journaliste assassiné en janvier 2007 à Istanbul. Ses chroniques reflètent un travail de réflexion à l’œuvre, évoluant d’une critique radicale du négationnisme vers une démarche de rapprochement arméno-turc qui se conclura par un dépôt de gerbes unitaire entre Turcs et Arméniens au pied de la statue du Père Komitas à Paris en 2007.
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ISBN : 978-9939-816-00-5
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Prix : 10 euros ( + 4 euros de port ). S’adresser à l’auteur :
denisdonikain@gmail.com
Ou à la Librairie Samuelian 51 rue Monsieur le Prince Paris, 75006
Tél. 01.43.26.88.65
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EXTRAIT :
Au nom de tous les miens, pardon Monsieur Erdogan !
" Il appartient aux Arméniens de faire
des excuses à la Turquie suite à leurs allégations erronées
de génocide pendant la première guerre mondiale. "
a déclaré lundi 11 avril 2005, M. Recep Tayyip Erdogan, au cours de sa visite officielle en Norvège.
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Ces enfants arméniens qu’on enterra vivants pas centaines remuent encore sous la terre autour de Diarbékir pour vous demander pardon. Ces déportés torturés par la soif que vos gendarmes attachaient face aux rivières ou promenaient le long des fleuves en leur défendant d’approcher ne sauraient faire moins eux aussi que d’implorer votre grâce. Au nom de ceux qui se sont jetés dans les flots pour s’y noyer en apaisant leur soif ou de ceux qu’on fit boire aux rivières souillées par des cadavres arméniens, je vous demande pardon. « Pardon ! » auraient dit ces enfants arméniens, sans père ni mère, qu’on vendait pour deux médjidiés, soit 1,20 euro, sur les marchés d’Istanbul, capitale ottomane. Ces filles qu’on passait aux soldats vous demandent elles aussi pardon d’avoir été violées ou d’avoir peuplé les harems de vos pères. On aurait pu aussi exiger de Madame Terzibachian d’Erzeroum de vous demander pardon pour avoir témoigné au procès Tehlirian en racontant comment à Malatia les femmes virent leurs époux tués à coups de hache avant d’être poussés dans l’eau et comment leurs bourreaux vinrent choisir les plus belles, transperçant de leur baïonnette celles qui s’y refusaient. Mais Madame Terzibachian n’étant probablement plus de ce monde, je vous demande pardon à sa place d’avoir porté l’accusation contre le soldat qui trancha la tête de son propre frère sous les yeux de sa mère aussitôt foudroyée, et qui jeta son enfant pour la seule raison qu’elle le repoussait. Pardon de vous avoir offensé au nom des Arméniennes de Mardin dont on déshonora les cadavres encore frais. Les Arméniens qu’on jeta par centaines dans les gorges du lac de Goeljuk, non loin de Kharpout, selon ce que le consul américain nous en a rapporté, s’excusent par ma bouche d’avoir porté atteinte à votre honneur que leur mort accuse les Turcs de les avoir acculés dans une nasse avant de les égorger. Je vous fais grâce de ces restes humains qu’on dépouilla de tout, de leurs maisons, de leurs biens, de leurs vêtements, de leurs enfants, et ces enfants de leurs propres parents, de leur innocence, de leur virginité, de leur religion, de l’eau qu’on boit quand on a soif, du pain quand on a faim, de leur vie autant que de leur mort, de leur paysage familier et de la terre de leurs ancêtres… De tous ces gens me voici leur porte-parole, ils parlent en moi, je les entends agoniser dans mon propre corps, pour vous demander pardon d’avoir existé, pardon d’avoir été trompés, turcisés, torturés, ferrés comme des chevaux, violés, égorgés, éviscérés, démembrés, dépecés, brûlés vifs, noyés en pleine mer, asphyxiés, pour tout dire déshumanisés… Car vous n’êtes en rien responsable des malheurs absolus que vos frères inhumains firent subir aux nôtres, frères humains trahis dans leur humanité. Non, l’histoire de vos pères n’est pas votre histoire. L’histoire de la Turquie ne naît pas sur ces champs de cadavres arméniens. Et pourquoi donc supporteriez-vous les péchés de vos pères ? Qui oserait vous faire croire que ces maisons désertées par les Arméniens ont été aussitôt habitées par les vôtres ? Que des villages entiers, vidés de leurs habitants naturels, ont été occupés par les vôtres, au nom d’une légitimité illégitime ? Que la ville de Bursa comptait 77 000 Arméniens durant la période ottomane, plus que deux au premier recensement ? Que les richesses de ces Arméniens pourchassés, déportés, anéantis aient nourri ces prédateurs qui furent d’une génération dont vous ne fûtes nullement engendré, Monsieur Erdogan. Il faut que les Arméniens s’excusent d’avoir été là où vous n’étiez pas encore. Qu’ils s’excusent d’avoir proclamé depuis 90 ans, d’une manière ou d’une autre, par des livres ou de vive voix, par leur mort sur les chemins du désert ou leur vie dispersée aux quatre coins du monde, que le génocide arménien est et sera toujours le fond noir de l’identité turque.
Avril 2005
VERS L'EUROPE,
du négationnisme au dialogue arméno-turc