Député PS, Arnaud Montebourg se demande
bien à quelles " contreparties " sera obligé le
président Sarkozy qui se fait transporter sur son lieu de vacances
en empruntant l'avion du businessman Vincent Bolloré. Il est vrai
que cette collusion d'un chef d'État avec un homme d'affaires a
quelque chose de malsain. On me dira que c'est autant d'économie
réalisée sur le budget de l'État et que Nicolas Sarkozy
étant un homme comme un autre a le droit d'avoir des amis et de
bénéficier de leurs marques d'intérêt. Mais
prendre l'avion dans ces conditions et d'une manière aussi ostentatoire,
c'est véritablement manquer de hauteur. N'est pas De Gaulle qui
veut.
Il existe toutefois un pays où ce genre d'oxymore
ne pose pas de problèmes de conscience. En Arménie, les
hommes politiques peuvent conjointement défendre les intérêts
du peuple comme députés et défendre leurs intérêts
propres comme chefs de plusieurs entreprises. Au point qu'on se demande
si ce sont des hommes d'affaires qui font de la politique ou des hommes
politiques qui ont des affaires. On ne saurait interdire à un Arménien
d'échapper sa nature commerçante, ni de transcender un milieu
où tout le monde ne pense qu'à ça. Et puis, on n'est
jamais si bien servi que par soi-même, aussi sûrement que
tous les Arméniens sont frères et que chaque Arménien
pratique l'amour de son prochain comme on peut l'attendre d'un peuple
qui aura été le premier à faire du christianisme
une religion d'État plutôt qu'une religion d'argent. La preuve,
c'est que la diaspora arménienne, forte et fière de son
sens compatriotique de la charité, en augmentant d'année
en année ses scores au téléthon en faveur de l'Arménie,
permet aux politiciens arméniens de s'occuper des affaires arméniennes.
Louée soit-elle !
J'ajoute que, contrairement au président français, le président
arménien n'a pas besoin d'emprunter l'avion d'un homme d'affaires.
Il lui a suffi simplement d'en acheter un aux frais de l'État,
au nez et à la barbe de notre diaspora compatriotique, soit pour
faire ses courses au supermarché de la mondialisation, soit pour
demander à cette même diaspora de l'aider encore plus à
aider l'Arménie. Et peu importe, si un avion présidentiel
qui prend de la hauteur échappe à la vue des pauvres aussi
sûrement qu'ils échappent eux-mêmes à celle
de leur président parti en voyage d'affaires diplomatiques.
décembre 2007